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Golden Sunland

Golden Sunland est une entreprise de Singapour active sur l’ensemble de la chaîne de valeur de la production de riz au Myanmar. Elle utilise l’agriculture sous contrat et la technologie des semences hybrides respectueuses de l’environnement pour améliorer les revenus des agriculteur·rice·s.

L’ÉQUIPE

Pour commencer, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? 

Je m’appelle David Chen et je suis directeur de l’exploitation et cofondateur de Golden Sunland. Mon père travaille dans le secteur du riz depuis trente ans. Je baigne donc depuis toujours dans le monde du riz. À la maison, par exemple, nous avions six cuiseurs de riz. 
 
J’ai fait des études de biologie moléculaire car je me destinais au secteur de la sélection du riz. Il ne m’a fallu que deux ou trois ans pour réaliser que l’agriculture n’avait pas besoin d’un scientifique de plus. Ce qui lui manquait, c’était un agrégateur : quelqu’un capable d’appliquer concrètement la recherche sur le terrain en utilisant des partenariats adéquats et un modèle d’affaires adapté.

business model
APPROCHE D’ENTREPRISE INCLUSIVE

Que fait Golden Sunland ? 

J’ai cofondé Golden Sunland en janvier 2017 avec mon père Thomas Chen et avec Peng Jingkai. Nous sommes basés à Singapour mais nous travaillons au Myanmar. Notre slogan est le suivant : « cultiver du riz, cultiver la vie » : nous utilisons l’agriculture sous contrat et la technologie des semences hybrides pour produire du riz de qualité et aider les agriculteur·rice·s à échapper à la pauvreté. 

À quels problèmes votre entreprise est-elle confrontée ? 

Le Myanmar offre des conditions climatiques idéales pour la culture du riz. Pourtant, la productivité est faible car les agriculteur·rice·s sont fragmenté·e·s et utilisent des méthodes de production d’un autre âge. Le changement climatique ne fait qu’empirer les choses. Dans le même temps, la culture du riz est nocive pour l’environnement. 

Nous voulons proposer aux agriculteur·rice·s des méthodes de production à la fois économiques et écologiquement durables. 

Comment ? 

Nous fournissons des intrants et des services d’assistance technique à nos agriculteur·rice·s : coaching, récolte, raffinage, stockage et semences. À elles seules, les semences améliorent les rendements de riz de 30 % en moyenne. Les rendements de certain·e·s agriculteur·rice·s sont passés de trois à dix tonnes par hectare. Nous utilisons une variété hybride qui n’a pas été génétiquement modifiée. Les agriculteur·rice·s achètent les semences à crédit et avec une garantie de rachat. 

Nous aidons également les agriculteur·rice·s à s’auto-organiser et à faire baisser les prix d’autres intrants en les achetant en vrac. Cette coordination les aide également à améliorer leurs finances et à lutter plus efficacement contre les ravageurs. 

Que se passe-t-il après la récolte ? 

Nous utilisons un modèle d’agriculture sous contrat, ce qui signifie que nous garantissons aux agriculteur·rice·s le rachat de leurs produits. Nous convenons du prix à l’avance et nous définissons de stricts critères de qualité et de quantité. Nous payons jusqu’à 20 % de plus que le prix de rachat recommandé par le gouvernement. 

Pour éliminer les intermédiaires et offrir de meilleurs prix aux agriculteur·rice·s, nous commercialisons nous-mêmes notre riz auprès des consommateur·rice·s. Nous gérons, pour cela, notre propre marque, « The Little Rice Company ».
 

hausse de rendements
Impact

Quels bénéfices les agriculteur·rice·s tirent-il·elle·s de votre modèle d’affaires ? 
 
En moyenne, les bénéfices nets augmentent de 30 %, soit environ 40 USD par saison et par hectare. Nos agriculteur·rice·s les plus performant·e·s parviennent même à tripler leurs revenus. Sans compter que la garantie de rachat offre aux agriculteur·rice·s des revenus relativement stables. 

Des familles entières en bénéficient. En effet, lorsque les agriculteur·rice·s gagnent plus et travaillent plus efficacement, les enfants n’ont pas besoin d’aider dans les champs. Il·elle·s peuvent donc aller à l’école.  

Notre objectif à long terme est de fournir aux agriculteur·rice·s les outils et les systèmes dont il·elle·s ont besoin pour travailler collectivement et tirer les bénéfices d’une agriculture à grande échelle. Il·elle·s pourront ainsi développer, par eux·elles-mêmes, une agriculture hautement mécanisée et efficace et donc échapper à la pauvreté. 

Comment les femmes en bénéficient-elles ? 

Nous payons à nos agricultrices le même prix qu’aux hommes. Mais, honnêtement, je ne vois pas où est le problème. Nous avons de nombreuses agricultrices et cela ne fait aucune différence pour nous. 

Combien d’agriculteur·rice·s touchez-vous ? 

Nous avons touché environ 2 000 agriculteur·rice·s depuis la création de l’entreprise. En 2020, nous avons dû réduire leur nombre et quitter le delta d’Ayeyarwady à cause de la pandémie. Cette saison, nous coopérons avec 200 à 300 agriculteur·rice·s dans le centre du pays. 

Qu’en est-il de l’environnement ? 

Nous avons réduit notre empreinte carbone de 60 % depuis 2017. Pour cela, nous avons amélioré la productivité des agriculteur·rice·s et nous les incitons à adopter de meilleurs systèmes de gestion. Nous voulons également les aider à générer des crédits carbone, mais la pandémie nous a empêchés d’envoyer des inspecteurs sur le terrain. 

Nous avons également introduit une phase de croissance et des régimes de fertilisation spécifiques à chaque site. Notre utilisation des produits chimiques respecte les normes européennes, ce qui signifie qu’aucune substance dangereuse n’est utilisée. 

Comment mesurez-vous l’impact que vous avez ? 

Nous mesurons la hausse des revenus de tou·te·s les agriculteur·rice·s avec lesquel·le·s nous travaillons. Et nous surveillons notre empreinte carbone. En ce qui concerne les outils, Golden Sunland est certifiée B-corp. Nous utilisons leur excellent outil en ligne pour mesurer nos indicateurs ESG. 
 

nombre d'agriculteurs
MODÈLE D’AFFAIRES INCLUSIF

Qu’est-ce qui rend votre modèle d’affaires commercialement viable ? 

Nous desservons un très grand marché, tant au Myanmar qu’à l’étranger. Pour attirer les clients, nous faisons en sorte que le traçage de notre riz soit toujours garanti jusqu’à l’exploitation. Cela nous permet de générer de la confiance, mais aussi de l’empathie chez les acheteur·se·s à l’étranger. 

Depuis 2017, nous avons produit et vendu 4 000 tonnes de riz. En 2020, l’entreprise a enregistré un chiffre d’affaires de 650 000 USD. 

Bénéficiez-vous d’aides extérieures ? 

Selon les projets, nous collaborons avec d’autres organisations et ONG. Pour moi, les partenariats sont vraiment importants et nous permettent d’améliorer l’efficacité des services d’assistance technique. 

Par exemple, nous avons participé au projet Linking Labutta to Market en 2020. Mercy Corps, une ONG internationale, a organisé des petit·e·s exploitant·e·s en entreprises d’agriculteur·rice·s-producteur·rice·s. Nous leur garantissons l’accès au marché et nous leur proposons des formations. Une entreprise de fintech et une start-up d’agrotechnologie ont participé au projet pour leur proposer un accès aux financements et un suivi numérique.
 

chiffre d'affaires
OPPORTUNITÉS FUTURES

Quels sont vos projets pour les années à venir ? 

Nous avons investi dans des actifs durables, donc il est probable que nous continuerons à utiliser notre modèle d’affaires d’origine au Myanmar. Les restrictions nous ont conduits à modifier notre stratégie pour exporter moins et mettre davantage l’accent sur le marché intérieur. 

Nous venons également de lancer une nouvelle entreprise dérivée en collaboration avec Trendlines Agrifood Fund. Il s’agit d’une plateforme de notation de crédit et d’assurance baptisée AgriG8. En anglais, on prononce « agregate » car nous jouons le rôle d’agrégateurs. 

Pouvez-vous nous en dire plus sur AgriG8 ? 

Nous avons remarqué que les agriculteur·rice·s sont souvent bien formé·e·s aux pratiques agricoles durables, mais que l’innovation nécessite un capital de départ. Or, la plupart des agriculteur·rice·s sont considéré·e·s comme non solvables. Leurs seules sources de prêts sont les institutions de microfinance et les prêteurs informels qui pratiquent des taux d’intérêt de 30 %. Nous voulons aider les prêteurs commerciaux à évaluer les risques et à comprendre la valeur de ce marché inexploité. 

Comment cela fonctionne-t-il ? 

Les agriculteur·rice·s s’inscrivent et reçoivent des conseils sur les pratiques agricoles. Nous utilisons une approche de ludification pour les inciter à suivre les conseils et nous contrôlons leurs pratiques. Les informations que nous recevons limitent les risques pour les institutions financières car de meilleur·e·s agriculteur·rice·s font de meilleur·e·s emprunteur·se·s. Pour notre première opération pilote, nous avons trouvé un prêteur qui était prêt à abaisser immédiatement ses taux d’intérêt de 5 %. 

Pour les banques, la plateforme est aussi un moyen d’évaluer les performances ESG de leurs prêts. 

Quels sont vos projets pour la plateforme ? 

Cette année, nous voulons étendre AgriG8 à l’Afrique, au Cambodge et à l’Indonésie. Nous avons déjà trouvé des partenaires dans ces régions. Nous voulons également y ajouter un outil de mesure des émissions de carbone.
 

environnement bénifie
DIFFICULTÉS ET ENSEIGNEMENTS

Quelles difficultés votre entreprise et vous-même avez-vous surmontées ? 

Mon père est au Myanmar en ce moment. Lorsque les troubles politiques ont commencé, les actionnaires de l’entreprise étaient sur le point d’abandonner. Mais il est resté sur place et n’est pas revenu à la maison depuis deux ans. Nous ne voulons pas abandonner tout ce que nous avons construit là-bas. 

Sans compter qu’il est difficile de trouver des investissements dans le genre de travail que nous faisons. Il y a quelques années, j’ai rencontré un investisseur qui m’a dit que ce que nous faisons est désirable, mais pas souhaitable. Il est regrettable de constater que certaines personnes ne veulent qu’une chose : faire des profits, et qu’elles attendent que d’autres résolvent nos futurs problèmes. J’ai créé un jeu de rôle pour aider les gens à comprendre les différentes contraintes des chaînes de valeur. 

Quels conseils donneriez-vous à d’autres créateurs d’entreprises inclusives ? 

Quand nous parlons d’inclusivité, nous pensons toujours aux plus malheureux. Je veux inverser le processus en incluant également d’autres personnes. Les consommateur·rice·s, par exemple, ne savent souvent pas qu’ils font partie du problème. Ce n’est qu’en travaillant aussi de ce côté-là de la chaîne de valeur que nous parviendrons à améliorer le système alimentaire. Si nous nous contentons de subventionner la production des agriculteur·rice·s sans modifier les modes de consommation, rien ne changera. 
 

group of farmers
Credentials

Les récits à impact sont produits par le réseau iBAN (Inclusive Business Action Network). Ils sont créés en étroite collaboration avec les entrepreneur·e·s et les équipes mentionné·e·s. La production de ce récit à impact a été dirigée par Susann Tischendorf (concept), Olachi Opara (vidéo), Katharina Münster (texte et infographies), Christopher Malapitan (illustrations) et Alexandra Harris (édition). La musique est libre de droits. Les photographies sont fournies par Golden Sunland ou par Susann Tischendorf.

Mise à jour : 01/2022.